Que se cache t-il derrière le melon ? Episode 2 : le tri, le conditionnement et le transport
Pour lire l'épisode 1, c'est sur ce lien.
Après la visite des champs, nous avons visité la station de tri et de conditionnement Rouge Gorge. L’entreprise a beau être une entreprise familiale où se côtoient père, fils, oncles, tantes et cousins, chacun travaillant selon ses compétences et le type d’études effectuées, les locaux sont très impressionnants par leur taille.
C’est dans cette station que les melons sont triés puis conditionnés avant d’être transportés presque jusqu’à nos assiettes. Ces opérations ont lieu chaque jour, après la cueillette, durant la période de récolte qui, comme je l’avais décrit, s’étale sur 20 jours par parcelle, afin que le melon soit cueilli à maturité. Le personnel est donc très important en période estivale, bien que la marque Rouge Gorge ait également choisi de cultiver des pommes afin de pallier au problème de saisonnalité du melon et surtout de pouvoir garder les personnes compétentes toute l’année.
Les melons sont donc acheminés par camion, des champs vers la station dans des grandes caisses vertes, appelées Palox, celles qui étaient dans les champs, sur les tracteurs, dans mon épisode 1.
Chaque Palox comprend tous les éléments nécessaires à la traçabilité des melons. C’est comme cela que l’on détectera s’il y a par exemple un problème avec telle ou telle parcelle ou sur une journée de cueillette précise.
Les palox sont d’abords entreposées dans des chambres froides, juste le temps nécessaire pour les ramener à une température raisonnable, surtout en cas de forte chaleur, afin de ne pas abimer la chair du melon, particulièrement fragile.
En marge du tri : Contrôle de qualité, échantillonnage et mise en lots
Le processus de contrôle de qualité est assez impressionnant, toujours pour être certain que le consommateur n’aura pas de mauvaise surprise en ouvrant son melon à la maison. Je pensais bêtement qu’on retirait juste les melons fendus pour mettre les autres dans des cagettes mais c’est beaucoup plus complexe.
Avant de procéder au tri manuel des melons qui se fait sur une chaine, on procède à un échantillonnage durant lequel un certain nombre de melons de chaque parcelle sont sélectionnés afin de mesure leur taux de sucre, grâce à une machine (voir photo au dessus). Celui-ci doit être supérieur ou égal à 12°Brix (unité de mesure du taux de sucre). Certains melons sont également ouverts afin de détecter s’il n’y a un problème avec la chair, comme la vitrescence : défaut de texture de la chair (en gros, la chair est trop molle entre le cœur et le pourtour du melon. Toutes ces observations permettent de classer les melons par lots, chaque lot ayant ses propres caractéristiques, non dépendantes de la parcelle de récolte.
Cette mise en lot est très importante pour la suite, car on saura par exemple que pour tel lot, le fait d’avoir une peau lisse n’est pas bon signe. Cette information sera donnée au fur et à mesure aux personnes qui trient les melons sur la chaine.
Sur la chaine de tri, les personnes reconnaitront un changement de lot et donc un changement de caractéristiques, grâce à l’apparition de ces balles jaunes, invention personnelle de Christophe Couteleau, responsable des ventes.
Le tri et le conditionnement
Les melons sont déversés grâce à une machine sur un grand tapis roulant, sur lequel ils sont grossièrement lavés sous un jet.
Ils passent ensuite sur d’autres tapis roulants, équipés de cylindres, afin que les melons avancent et tournent également sur eux même pour faciliter le tri.
Chaque melon est examiné par des femmes qui les trient à la main, en retirant ceux qui ont un problème. Certains melons sont jetés (voir les gouttières en bas du tapis roulant), d’autres passent en second choix (en haut du tapis), les autres continuent sur la chaine.
A coté des femmes qui trient, d’autres femmes ouvrent de temps en temps un melon sur un lot, afin de vérifier à nouveau le taux de sucre, grâce à un petit appareil appelé un réfractomètre sur lequel on dépose un peu de chair de melon pour ensuite lire son taux de sucre dans le viseur.
Les melons passent ensuite sur un troisième type de tapis roulant où ils sont triés par calibre puis déposés manuellement dans des cagettes en bois, sur des alvéoles en carton. Les cagettes sont acheminées à un autre endroit où une machine étiquette chaque melon avec le sigle Rouge Gorge. Les cagettes sont empilées sur des palettes puis cerclées.
Interviennent ensuite les Fenwick qui, dans un ballet assez amusant, récupèrent chaque palette pour la mettre directement dans les camions. Les conducteurs de Fenwick ont une dextérité incroyable, surtout quand ils repartent en marche arrière du camion pour récupérer d’autres palettes. Anne et moi aurions pu passer des heures à les regarder, mais nous avions toujours peur d’être dans leur chemin.
Les melons sont ensuite acheminés vers des commerçants locaux, des centrales qui approvisionnent certaines grandes surfaces ou vers Rungis.
Et voilà tout le travail. Impressionnant non ?
Et encore, je n’ai pas parlé de tout l’aspect business, à savoir la prévision de nombre de melons récoltés qui se fait en recoupant des tas d’indicateurs, comme par exemple le comptage des fleurs dans les champs (si si), le fait que la production n’est pas forcement en adéquation avec la demande, ce qui est un problème majeur dans le commerce du melon, celui-ci étant un produit fragile que l’on ne peut pas vraiment stocker longtemps. C’est donc tout un art de pouvoir vendre toute sa récolte avec une marge suffisante.
La prochaine fois que vous mangerez un melon, j’espère que vous aurez une pensée pour toutes les personnes qui ont travaillé d’arrache pied pour le produire (et le vendre).
Moi, je ne suis pas prête d’oublier ! Merci mille fois à Christophe Couteleau pour cette visite.
Pour finir, un article du journal Libération que je trouve assez intéressant.