« Pascale, peut-on se voir la semaine prochaine ? J’ai un projet à te proposer, il s’agit de créer un menu pour un traiteur. »
Silence. Je me demande si mon interlocuteur ne s’est pas trompé de personne. Je sens qu’il ne dira rien de plus, certains projets ne se dévoilent pas par téléphone. J’accepte le RDV, il faut avoir un certain goût de l’aventure dans l’activité que j’exerce.
Juillet 2011, déjeuner dans une salle de réunion autour de plateaux repas de chez Déjeuner Livré, entité d’un très grand traiteur parisien. Leur mission : livrer tous les jours plus de 1 500 plateaux repas haut de gamme à une clientèle majoritairement professionnelle.
Trois fois par an, leur carte change et ma mission, si je l’accepte, sera de créer l’un des 13 menus qui composeront la nouvelle carte printemps été 2012.
Conquise par le plateau repas gourmand et de qualité, j’accepte le challenge.
La création du menu
3 fois par an, Gaëlle Poggiale, Directrice Générale de Déjeuner livré, donne un thème à sa nouvelle carte. Mi corse, mi bretonne, elle sait exactement ce qu’elle veut et pour la carte printemps été 2012, le thème sera « Locavore ». Déjeuner Livré étant en région parisienne, chaque plateau devra contenir au moins 50% d’ingrédients en provenance de producteurs situés dans un rayon de 200 km autour de Paris. Dans la réalité, ce sera bien plus. Sur le site de Déjeuner livré, vous trouverez plateau par plateau, la provenance des ingrédients avec parfois même le nom du producteur.
Pour chaque carte, il existe environ 13 menus (volaille, bio, poisson, sans gluten, végétarien, etc.). Je choisi illico de créer un menu végétarien, souvenir de mes déjeuners avec ma fille Gabrielle avant qu’elle ne passe son bac.
De retour à la maison, j’essaie de ne pas trop penser à la suite et je me concentre sur le type de repas que j’aimerais partager avec ma fille.
J’ai tout de suite l’idée de petits flans au cresson, c’est mon pêché mignon et le reste s’enchaine dans ma tête et sur mon petit carnet. Le menu locavore végétarien est prêt sur le papier.
La rencontre avec Déjeuner Livré
C’est au palais de Tokyo, un matin très frais d'Octobre que je rencontre pour la première fois Gaëlle Poggiale, Directrice Générale de Déjeuner livré, avec qui nous échangeons sur la démarche qualité et environnemental de Déjeuner Livré.
C’est là que j’apprends par exemple que le packaging des plateaux repas est soit réutilisable (sac en toile de jute, verre en verre, couverts en bambou qui font le bonheur de certaines photos de mon blog), recyclables ou biodégradables (assiettes, couvercles, pochette à couvert, set de table, et serviettes).
Côté cuisine, et j’aurai le plaisir de le découvrir en réel, tout est préparé à partir de matières premières brutes, à part les petits pains bio préparés par un artisan de la région et les crackers à l’épeautre et aux graines qui accompagnent les fromages (j’en suis devenue folle).
Le choix des produits se fait selon des critères très précis (produits de saison, produits français, pas de poisson dont l’espère est menacée, ni de poissons issus de zones de sur pêche, l’utilisation d’au moins un produit labélisé par plateau, la volonté d’utiliser au moins 2 produits bio et/ou issus du commerce équitable par plateau, en dehors du pain et du chocolat qui le sont systématiquement, etc.).
Coté nutrition, les menus sont équilibrés et sains, tout en restant gourmands. Une nutritionniste les valide avant qu’ils n’apparaissent sur les cartes.
La rencontre avec les chefs du département R&D
Livrer des plateaux repas représente un boulot immense en amont de la cuisine et de la livraison.
L’une des premières choses à faire, une fois le thème choisi est d’imaginer les 13 menus, afin qu’ils soient gourmands, attractifs, équilibrés, faisables à grande échelle, respectueux du cahier des charges, etc.
C’est la tâche du service Recherche & Développement.
Autour d’un déjeuner, je fais la connaissance de Paul Pierron, Directeur R&D salé chez Déjeuner Livré et de Julien Franchet, Chef R&D sucré. Ils aiment visiblement leur métier et ça fait plaisir à voir.
Paul Pierron est passionné de cuisine depuis toujours. Il me raconte la fête de l’humanité, la buvette que tenait son père et lui, du haut de ses 12 ans, fasciné par leur voisin en train de cuisiner non stop pour les visiteurs. Il sait qu’il en fera son métier. Après avoir travaillé au Royal Monceau, il devient chef cuisinier chez un grand traiteur parisien puis devient Directeur du service R&D salé de chez Déjeuner Livré, dès la création de l’entreprise.
Julien Franchet a toujours cuisiné et s’est dirigé vers la pâtisserie après avoir été chef cuisinier. Il a travaillé dans plusieurs cuisines de grands hôtels et son idole est Pierre Hermé. Il a une façon de voir la pâtisserie que j’apprécie beaucoup : fraicheur, gourmandise, simplicité et esthétisme.
En discutant avec eux et en découvrant leurs parcours, j’ai un moment de panique mais il est trop tard, ils ont déjà reçu mon menu par mail.
Même si mon parcours n’a rien à voir avec le leur, ce n’est pas grave, quand on parle de cuisine, on se comprend et grâce à eux, j’ai appris beaucoup de choses.
Paul, en plus de la cuisine manie le crayon avec talent et je suis très émue en découvrant qu’il a retranscrit mon menu en dessins.
Mon idée d’entrée : Petite salade croquante de carottes nouvelles et de radis, vinaigrette à l’huile de colza ou à l’huile de sésame et graines de courge
Mon idée de plat : Petits flans au cresson et à la ricotta, salade de blé aux champignons de Paris et aux asperges
Mes idées de desserts : Pannacotta + petite salade de fraises au sirop de coquelicot de Nemours et petit macaron à l’amande OU Salade de fraises au sirop de coquelicot de Nemours et petit macaron à l’amande
Nous décidons ensemble de changer le cresson de mon menu par de la roquette pour des questions de facilités d’approvisionnement. Les asperges se transforment en courgettes crayon, sachant que le menu doit être livré jusqu’en septembre. La ricotta du flan se transforme en brousse, le dada de Paul si j’ai bien compris
Pour le dessert Julien préfère l’idée de la pannacotta et suggère de modifier légèrement le montage de ma pannacotta en mettant le sirop dans la crème et en servant les fraises avec un peu de confit de coquelicot, spécialité de Nemours, menu locavore oblige.
Tout cela me va très bien, mon menu végétarien locavore avec quelques ajustements va pouvoir être préparé par Paul et Julien, en plus de tous les autres menus.
Un aperçu de l’aventure en images …
La suite au prochain épisode.