Je reviens admirative d'un voyage dans le Cantal à la découverte du fromage Cantal AOP. Nous avons tellement de chance d'habiter en France et de pouvoir découvrir d'aussi belles régions. Et quand on nous offre la possibilité d'aller à la rencontre de personnes passionnées qui font un travail de grande qualité, c'est tout simplement magique.
La semaine dernière, Silvia, Pascale, Manue, Dorian, Marie, Alexandra et moi avons découvert les secrets de la fabrication du Cantal AOP. Ecrire ces lignes me permet de faire durer la magie de ces quelques jours.
Quand on parle de fromage, on commence souvent par dire de quel animal vient le lait puis on enchaine immédiatement sur le caillage, une des premières étapes de fabrication d'un fromage. Pour une fois, je vais passer un peu de temps à parler du lait car il a une importance capitale et j'avoue que je ne connaissais pas toutes les subtilités.
Comment est fabriqué la Cantal AOP, du lait à la tomme fraiche ?
Les vaches, le lait, les éleveurs
Nous avons eu la chance de rencontrer Gaby Charreire et son frère, éleveurs de vaches laitières (Aubrac, une vache rustique bien adaptée à la région du Cantal, Montbéliard, Holstein, etc.).
Ils sont producteurs de lait AOP Cantal à Cussac. C'est ce lait qui va servir tous les jours à fabriquer du fromage de Cantal. C'est un métier que je ne connaissais pas et c'était très intéressant de les écouter nous expliquer combien la qualité du lait est primordiale pour faire un bon fromage et que pour cela, pas de secrets, les vaches doivent être nourries naturellement (herbes et foin) toute l'année et subir le moins de stress possible. Saviez-vous qu'une vache nourrie naturellement a une durée de vie plus importante (12 à 13 ans au lieu de 8 à 9 ans) ? En revanche, elle donne moins de lait.
Chez Gaby Charreire, le lait produit est du lait AOP, ce qui veut dire qu'il faut respecter certaines règles, comme le fait de nourrir les vaches toute l'année à l'herbe et au foin produit sur la zone, de les nourrir au pâturage pendant au moins 120 jours par an (la qualité de l'herbe est meilleure et il y a plein de petites fleurs qui donnent plus d'arômes au fromage), d'avoir une densité de vaches faible (1 vache pour 1 ha), afin qu'elle ait une nourriture suffisante en herbe), etc.
Les vaches sont traites matin et soir, sur place, dans les pâturages, histoire de ne pas les déplacer et d'éviter ainsi le stress. Dans un coin du pâturage, une traite mobile attend son heure. Il parait que les vaches sentent quand c'est l'heure de la traite et qu'elles se dirigent naturellement vers la traite mobile. Le lait est mis dans des boules à lait puis dans un tank à lait entreposé dans un bâtiment jusqu'à la collecte, afin que le lait soit refroidi à 4°C.
Les vaches donnent environ 20 litres de lait par jour, 300 jours par an.
La collecte du lait
C'est à la laiterie artisanale de Pierrefort (Fromagerie des Monts du Cantal) avec Jérôme, que nous avons découvert les secrets de fabrication. C'est une coopérative située sur le plateau de la Planèze. Ils sont responsables de la collecte du lait, de la fabrication, de l'affinage et de la commercialisation du Cantal AOP.
Ils ont 2 sites, un pour la fabrication des fromages au lait cru (Le site de Valuejols) et l'autre pour le lait pasteurisé (pour pasteuriser le lait, on le chauffe à 72°c pendant 33 secondes).
Le lait est collecté tous les jours et la collecte se termine à 3 h du matin. Les camions vont récupérer les tanks chez les producteurs de lait. Sur le camion, la lait est prélevé et analysé quotidiennement.
La fabrication du Cantal
Ecrémage, caillage et brassage
Tout commence à 5 h du matin à la laiterie de Pierrefort. Le lait est arrivé, il a été analysé directement dans le camion et il est à une température de 4°C. On commence par l'écrémer pour passer de 35% de MG à 30 à 32 %. Il faut savoir que pour 10000 litres de lait, on va récupérer 1000 litres de crème, qui va être vendue et donc utilisée.
Le lait est mis dans une immense cuve qui contient 10000 litres de lait et chauffé à 32/33 °C. On ajoute de la pressure et des ferments lactiques (ce qui va jouer sur la texture, le goût et la croûte du fromage).
Le lait est brassé dans la cuve, de plus en plus rapidement, au fur et à mesure que le caillé se forme et devient de plus en plus ferme.
Il faut environ 15 minutes pour que le caillé se forme, on attend alors encore 15 minutes supplémentaires et on brasse le contenu de la cuve avec un tranche caillé. Au début, le caillé ressemble à un yaourt velouté puis à un yaourt , jusqu'à avoir une texture de flan. Avec le tranche caillé, les grains commencent à se former. C'est la première fois que je voyais le caillage en direct, c'est assez magique.
Les différentes étapes du caillage
Décaillage et égouttage
Le fromager surveille le caillage, c'est lui qui gère et estime quand c'est terminé. C'est le seul à avoir cette responsabilité (il y a 3 fromagers dans la laiterie de Pierrefort). Il procède au décaillage, ce qui veut dire qu'il sépare les grains de caillé du petit lait (lactosérum). A ce moment, le fromager vide la moitié de la cuve (il retire d'abords le tranche caillé, le sérum est aspiré dans un tank, après avoir mis un filtre qui retient le caillé et le caillé est mis dans un grand bac qui ressemble à une baignoire. Le bac, appelé bac de pré-pressage est tapissé d'un linge. A ce moment-là, le grain de caillé est encore un peu humide.
Il faut savoir que dans cette immense cuve de 10 000 litres de lait, il y a 90% de petit lait et 10 % de caillé. Le petit lait n'est pas jeté mais il est envoyé ailleurs afin d'être transformé en poudre de lait.
Premier Pressage et maturation
Caillé dans la presse
Le caillé est récupéré à l'aide d'un sceau dans le bac de pré-pressage, en ne prenant que la surface et le mettent dans une presse également tapissée d'un linge. C'est un travail assez physique et les fromagers ont des beaux bras musclés (clin d'œil à mes copines blogueuses). Une fois la presse remplie de caillé, on descend une sorte de couvercle pour effectuer le pressage. On ouvre ensuite le couvercle, on découpe des gros cubes de caillé afin que le reste du petit lait puisse s'échapper et on presse à nouveau. Cette opération va être effectuée 5 fois.
A ce moment-là, on a ce que l'on appelle de la Tomme fraiche. Elle a un bon goût de lait, elle n'est pas encore salée. La tomme fraiche est utilisée par exemple pour la truffade (pommes de terre sautées puis mélangées à de la tomme fraiche) ou la tarte sucrée à la tomme. L'aligot de l'Aveyron est aussi préparé à base de tomme fraiche et de purée de pommes de terre.
Tarte à la Tomme fraiche (sucrée)
Cette Tomme va devoir passer par plusieurs autres étapes de fabrication avant de devenir fromage de Cantal. Dans quelques jours, je vous parlerai de broyage, de salage, de presse, de montage, de stockage et d''affinage et puis je vous raconterai la différence entre un Cantal Laitier et un Cantal fermier.
Et si vous voulez prendre de l'avance, il y a le billet de Manue.
Stay Tuned !